L’autre jour, je regardais YouTube, comme 80% de ma life, et j’avais jamais remarqué à quel point je ne voulais pas être youtubeur (ou streamer cela marche aussi). Et à quel point je ne comprenais pas les jeunes et leurs envies de devenir un youtubeur célèbre. Petite explication.
Depuis quelque temps, il existe de nombreux sondages qui montrent que les enfants d’aujourd’hui ne veulent plus devenir pompiers ou joueurs de foot, mais youtubeur. C.-à-d. jouer toute la journée devant un écran, être adulé, et gagner de la thune.
Bon la réalité est plus compliqué que cela, les youtubeurs font des heures à plus savoir qu’en foutre, tombent en dépression, se font harceler (pour les filles principalement), et tout cela pour, dans la majorité des cas, tomber dans l’oubli avant même d’avoir connu le succès. Selon une étude, seulement 5% des gens qui streament sur la plateforme Twitch ont moins de 5 viewers… autant dire que dalle.
Alors, c’est déjà un bon argument en soi, pourtant je ne vais pas parler d’eux non plus. Non, ceux qui m’intéressent, ce sont ceux qui ont réussi, les Jeel, Squeezies, Zerators, Cypriens et autres… Car eux, je ne veux pas être à leur place, en aucun cas et pour une raison très con, ils sont loin d’être libres de tout. Comme on dit, plus on est grand, plus on tombe de haut. Et plus on est connu, plus on peut être vite effacé. Mais reprenons du début. À la base, youtubeur, c’est quoi ?
Bon, le métier a bien évolué c’est évident, car il y a de cela quelques années, le terme youtubeur n’existait pas pour qualifier ces prépubères nombrilovidéastes. À la base, il y a 15 ans, le but était simplement d’allumer une caméra et de s’amuser devant. En aucun cas il n’y avait de l’argent en jeu. Mais comme dit l’adage : fais fonctionner un truc et l’argent le pourrira. Et donc depuis un certain temps, les plateformes (youtube/twitch en tête) se sont transformées en machine à cache, mais surtout en ferme à autoentrepreneur. Tous les grands créateurs des plateformes (youtubeur et entête) actuelles ont leurs boites, créés des vidéos aux budgets télévisuels et font la promotion de sponsors en tout genre. Bref, le cercle vicieux du capitalisme. Plus de vues, plus de sponsors. Plus de sponsors, plus d’argents… plus d’argents, plus d’argents…
Et ça, cette idée comme quoi les youtubeurs sont indépendants, font ce qu’ils veulent, etc., je l’ai cru pendant longtemps, jusqu’à ce que je voie une vidéo: celle de Jeel au japon qui essaie un kimono (ici).
Jeel, pour ceux qui ne connaissent est une streameuse twitch (principalement) qui fait de temps en temps des vidéos concepts principalement sur le japon, car, comme moi, elle beaucoup ce pays, sa culture, les Japonais (en tout cas, les Franco-Japonais), etc. Comme toute streameuse twitch, elle utilise YouTube pour 2 raisons, la première mettre ses rediffs de let’s play, la seconde faire des “blogs” (au sens large) sur des sujets qu’elle aime bien (c’est ouf cette mode).
Et le vlog qui m’a fait tilter, c’est celui où elle va se déguiser en geisha de la tête au pied dans les allées de Kyoto.
Et là arrive le problème. Dans la vidéo, à la minute 9.11, elle dit ceci.
J’ai déjà vu sur internet que certain se faisait accusé d’appropriation culturelle en faisant ce genre d’activité mais…
S’en suit une interview de la vendeuse sur le fait qu’une étrangère met un kimono.
Puis, à la minute 21 elle interroge la vendeuse de nouveau sur le même sujet, celui de l’appropriation culturelle.
Et c’est là que cela m’a fait tilt. Pourquoi le dire plusieurs fois ? Quel est l’intérêt ? Déjà que la première fois, je ne voyais pas la raison, mais deux fois dans une même vidéo ? Quel est le message qui veut être passé ? Et puis j’ai compris.
Si elle insiste là-dessus, c’est par peur de se prendre une bullshit storm et surtout des conséquences. Si elle avait été accusée d’appropriation culturelle, sa vidéo aurait probablement été reportée par les idiots de services de la twittosphère, sa chaine aurait été probablement sujette à des représailles (moins mise en avant, etc.) et je parle même pas du reste (harcèlement, etc.).
Comprenez bien qu’aujourd’hui, les youtubeurs doivent prendre des gants dans tout ce qu’ils font (et plus encore quand t’es une femme, mais c’est un autre débat). Ils n’ont personne qui les protège, ils ont choisi d’être indépendants, ils sont aujourd’hui seuls, abandonnés. Ces gens vivent dans la peur, la peur d’être effacé par le saint algorithme. Et donc, il ne faut pas faire de bruit, tout lisser. C’est pour cela qu’on trouve surtout du fit&fun sur les plateformes et que c’est ce qui est le plus mis en avant. Avant YouTube était une plateforme de liberté d’expression, aujourd’hui c’est la télé. JDG avait un peu raison sur cela.
Il est notoire que les plateformes n’en ont mais rien à foutre de leurs créateurs. Les plateformes veulent juste du cash et le cash il n’est pas fait pas les créateurs, il est fait par les algorithmes sur base de ce que font les créateurs et cela change tout. Je ne compte plus le nombre de vidéos, twittlonger, etc., qui disent qu’il y a personne au bout du fil lorsqu’ils ont un problème avec la plateforme intel (Youtube, Twitch, etc…). Je ne compte plus le nombre de développeurs travaillant dans la Silicon Valley qui disent que personne ne sait comment fonctionne l’Algorithme. Chez Facebook, ils sont obligés de créer des comptes anonymes afin de faire des tests et comprendre (par rétro-ingé) comment fonctionne ce que des anciens ont créé.
En fait, ce système n’a rien de libre, il me ferait même plus penser au communisme (de l’URSS), où on était effacé sans raison, par une main invisible (ici les algorithmes) et sur base de délation (le report button)(comme le faisait Staline. C’est ouf.)
Prenez la cancel-culture aujourd’hui. Bien que contestée dans son application, elle ne repose que sur un principe, les algorithmes. Ce sont les algorithmes qui permettent à une minorité d’effacer quelqu’un sur internet. Sans algorithme, pas de cancel de culture. (Il y a une rumeur que pour qu’un tweet, un livre Amazon, une vidéo YouTube,etc., il ne faut pas plus de 20 personnes qui la reportent. 20, c’est peu.)
Autre exemple, quand il y a un problème, non seulement, il est impossible de se plaindre, mais en plus, les représailles sont énormes. (Ça aussi j’ai entendu qu’il ne fallait pas s’engueuler avec les modos de YouTube et de Twitch, sinon, la peine était sévère…)
Troisième exemple, si votre comportement n’est pas exemplaire, et même si cela n’a rien a voir avec votre activité sur internet. La plateforme vous punira (au hasard Leo Grasset). Qui est YouTube pour dire à des gens qu’ils doivent être parfaits en dehors de Google si ce n’est quand google se prend pour le Parti au pouvoir qui aurait droit de vie et de mort sur votre vie… avant de vous envoyer au goulag numérique).
Encore un pour la route, quand il y a un changement d’en haut (hausse des prix, de l’algo, etc.), le peuple (ici les youtubeurs) doit l’appliquer et surtout ne pas se plaindre sous peine de sanction (ça aussi, il y a des rumeurs).
Et sinon, le système favorise la corruption (les faux clics, les entraides, la cooptation, etc.), et en aucun cas la méritocratie ou la liberté de soi. Je ne connais pas un youtubeur qui n’a pas réussi en se montrant dans une autre vidéo avec un autre créateur connu. En fait, les youtubeurs sont tellement soumis à l’algorithme qu’ils veulent tous le quitter d’une façon ou d’une autre ; en ouvrant un bar à pirate, en vendant des fringues, des livres, en ouvrant un musée.
Ce qu’a fait la Silicon Valley, c’est appliquer aux youtubeurs ce que l’agro a appliqué aux animaux : de l’élevage en batterie où les youtubeurs ne voient plus la lumière du jour, sont obligés de pondre des œuvres qui ont la même saveur et se ressemblent tous, et dès qu’il y en a un malade, c’est tout le troupeau qui est détruit.
Nope, je ne veux pas être youtubeur sur internet. Or, ce qui est dit sur YouTube peut être dit pour Twitch, Wattpad, etc., tout médium. Et je suis sur Medium.
Alors, Medium n’en est pas encore à être modéré comme des ports avec l’aide d’un algorithme bien vénère (déjà parce que c’est principalement de l’écrit, ce qui simplifie beaucoup la vie). Mais la question pourrait se poser un jour. Le jour où Medium devient dictature jusqu’à interdire certains mots comme le fait Google, quelle est la décision à prendre ? Pour moi, elle sera facile (20 followers, c’est peu, et je suis venu ici pour d’autres raisons), mais quid des gros comptes, vont-ils se soumettre ? Vont-ils déménager ? Aller sur une autre plateforme ?
Mais bref, je n’ai vraiment pas envie d’être youtubeur.
By elekis on .
Exported from Medium on January 6, 2024.